Chut
Immobile
Le manège s'est arrêté
Le voyage a cessé
Le chemin s'est suspendu
A ce temps perdu
Immobile
Une feuille fragile
S'accroche au vent
Froid en tremblant
Pensant au passé
Dépassé
Lentement elle attend
Le déclin en souffrant
D'un chant indélébile
Inutile
Dans cet air inconnu
Elle voit son cœur perdu
Sur le rameau cassé
Le ciel s'est effacé
Le bruit du silence
Le bruit d'une plume,
D'une plume d'argent,
Dit que nous ne fûmes
Qu'à peine des gens !
Musique légère,
Légèrement fanée,
Tu n'es que sévère
Tuant le passé.
Maintenant qu'importe,
Ce lourd bruit du silence,
Il n'est que la Mort,
Le fruit d'une science.
Inspiré de « Vers sans rimes » de Paul Verlaine
Chute
Je me suis perdue dans les terres
Au point de vouloir t'oublier
Et sur ce chemin singulier
Je ne désire que te taire.
Je m'en vais en fermant les yeux
Pour que s'efface cette flamme
De mon cœur au fond de mon âme
Jusqu'à détruire tous tes dieux.
Je suis fragile et je me couche
Sur tous tes songes en éveil
Et je plonge dans le sommeil
Chaque idée devenue farouche.
Je me tais dans tout ce fracas
Dressant mon silence en façade.
Je ne suis pas une oréade ;
Sans un mot, je renie tes bras.
Araignées
Les silences lourds et sombres
Se teintent de vanité
En plongeant dans les décombres
Pour chercher l'obscurité.
Tapis dans toutes les ombres
Quêtant la virginité,
Se trouve dans les pénombres
Leur insensibilité.
Lâchant la vie chimérique,
Ils tuent chaque mot unique
Comme ils plantent des clous
Et dévorent, tyranniques,
Les vieux mondes utopiques
Enterrant les amours flous.
Vacarme
Les mots jouent, les mots me hantent. Mais
C'est ce lent silence qui me blesse.
Ni haine, ni amour, ni faiblesse,
Rien qui ne viendrait troubler ta paix,
Le présent a une autre nature
Qui s'enlace avec le mot jamais.
Le temps a rendu la terre dure
De tous ses pêchés le châtiment.
Le ciel, sans un mot, assurément,
Ne veut voir pourrir sa créature ;
Pas un regard, ni de repentir,
Juste le choix d'une valeur sûre.
Laissant chaque seconde investir
L'espace comme une puissante arme,
Tu te tournes pour masquer la larme
Coulant dans le silence à venir.
Dans ma tête, il n'est que ton vacarme,
Que le temps qui s'arrache de toi.
Je suis le même, pardonne-moi !
Parfum de silence
Un silence, un silence nocturne ;
Je pourrais croire qu'il est heureux.
Flotte le parfum de tes cheveux
Dans le ciel à l'humeur taciturne.
Un silence, un silence de l'urne
D'une fleur bleue au cœur fluctueux ;
Danse le parfum insidieux
Parmi l'or fou et le gris saturne.
Un silence, un silence assassin ;
Caresse le parfum de ton sein
Mon corps et sans un mot m'emporte.
Un silence, un silence passé ;
S'est répandu mon parfum aimé
Quand s'est fermée cette porte morte.
Mont
Musique, douce musique
Du vent au bord du chemin,
J'entends sous le vieux sapin
Les désirs de la supplique.
La beauté mélancolique
De la falaise aux parfums
Mêlant lichens et orpins
Résonne d'un cœur unique.
Sous le ciel au bleu discret,
Chaque chant est un poème
Contant un nouveau secret.
Agenouillé devant toi,
- Chut, Je me tais - je te crois,
Je te regarde et je t'aime !
Culte
Le silence n'est que mépris !
Tu l'as volé à une étoile
Sans que tu en saches le prix.
Tu as couvert le ciel d'un voile
Perdue dans ce temps inconnu.
Il a plu sur la bergerie
Et chaque image a disparu !
Il a plu pour toute la vie
Sur les marches de la chapelle.
Vois, même la lune a quitté
Cette terre devenue aigre.
Chaque saison n'a plu été
Que pluie d'orage et de vinaigre.
Je ne sais si l'on se rappelle
Ce regard d'un instant divin,
Le délicat éclair occulte
Qui modifie un lendemain.
Aimer Dieu n'est pas une insulte !
Chut ! Le silence est d'or
Pourtant je t'aime encor !
Au départ du silence
Chut ! Amie et amour quelque part...
Dans sa chute le froid agonise,
D'un seul mot un rayon a surgi.
Sur le mont le temps s'est assagi
Sans jamais en avoir la maîtrise.
L'herbe repousse, elle n'est plus grise.
Peut-être le ciel a-t-il rougi ?
On ne sait ce que le temps régit,
A se demander s'il improvise.
Attendre sans un bruit est-ce mieux
Quand on sent ce silence joyeux ?
Chaque instant peut changer notre histoire.
Sous la peau s'insinue le dégel,
La peur est noyée dans la mémoire.
Le silence serait-il mortel ?
Ecoute le silence qui part.