
Verre de rage
Acharné, décharné,
Aucune force, rien que la rage,
Je ne peux me souvenir de l'orage.
Est-ce une émeute dans ma tête
Ou simplement une tempête
Dans un verre d'eau ?
Je ne sais à quel moment
A commencé le massacre.
Je ne sais à quel instant
Se situe la rupture.
Je ne vois maintenant de la nature
Humaine que le fond du verre.
Est-ce la crue
Ou la sécheresse
Qui font qu'il déborde ?
Je ne peux boire que les déboires
De ce calice jusqu'à la lie.
Je ne peux voir qu'un bout de l'histoire
De cette eau plate et saumâtre.
Impossible de vider ce verre !
Un verre d'eau
Le carnet du bois de hêtres
Hêtre
As-tu un jour entendu
Dans le silence éternel
Les feuilles au bord du ciel ?
Tu le sais : tu es venue...
Dans les bras des branches ragent
Les tourments des gens passant
Un à un nus sous l'orage.
Je crois en cet arbre aimant...
à cet arbre au milieu du chemin
Est-ce
Est-ce toi
Qui cherche le ciel
Est-ce le ciel
Qui pèse sur toi
Est-ce le vent
Parfois
Est-ce le temps
Sûrement
Un peu de tout cela
Est-ce que tu m'attends
Est-ce que tu me penses
Est-ce la dernière danse
Je ne sais pas
J'ai encore froid
à un vieux pin en S
Seul au pied du saule
Il pleut
Il pleut dans tes branches
Des mots et des feuilles
Il pleut
Il pleut dans ton cœur
Des silences de sève
Il pleut
Il pleut sur le bord du lac
Ce bonheur dont je rêve
Et là
Sous cette pluie
Je m'appuie contre toi
Pour regarder le temps flotter
à un saule pleureur
L'arbre nu
Le ciel me regarde et dans ses reflets je vois qu'il bavarde des êtres discrets
Je sais qu'il leur conte tous ces jours d'avant ceux où j'avais honte de faire semblant
Maintenant je suis nu face à la pluie les bras dans la nuit du temps qui s'ennuie
Le ciel me regarde et dans ses reflets je vois qu'il me darde de tant de regrets
à un vieil olivier
Image frêle
Au cœur du jour, l'image frêle,
Souple et belle de cet oiseau
Qui ouvre lentement ses ailes
Toujours plus haut.
Dans la lumière, elle s'élève
Au firmament de la forêt
Volant à chaque instant ses rêves ;
L'amour paraît.
Si simple, son corps se dévoile
Lorsque se cache le soleil,
Alors elle cherche l'étoile
Les bras au ciel...
à un bouleau blanc
Eucalyptus
Comme un petit ours au pied d'un eucalyptus
Je perçois le feu, je perçois la flamme
Sous ce ciel rouge cendres
Mon corps accroché au tronc en lambeaux
Je perçois le vide, je perçois la fin
Sous ce ciel de janvier
Mon cœur avait pour horizon la cime
Il n'a plus que le néant des abîmes
Le sol a disparu
Et mon arbre est mort
Dans ce ciel de braise
Je ne suis
Qu'un petit ours au pied d'un eucalyptus
Mon eucalyptus aux parfums de bonheur
Mon eucalyptus aux saveurs de lenteurs
Et avec lui, je meurs
à tant d’eucalyptus
01.20
Pom
L’instant s’arrête
Le long du chemin
Restent quelques douceurs
Rouges et vives
Petites pommes
Petit amour
L’instant est vrai
Le jour est frais
L’instant s’arrête
Et continue doux
Restent quelques graines
Sèches et sombres
Petites pommes
Petit amour
L’instant est loin
Le jour s’endort
L’instant s’arrête
Il pousse alors
Restent quelques fleurs
Blanches et pures
Petites pommes
Petit amour
L’instant sourit
L’instant se vit
L’instant s’arrête
Dans le jardin
Restent quelques parfums
De pommes et d’amour
à un petit pommier d’amour
Si près
Si près
Sous les fougères
D'un regard flamboyant
À la recherche de l'automne
Si près
Au bord de l'eau
À travers les vagues
Des anciens sanglots
Si près
La main sur l'écorce
Caressant le temps
Qui se décompose
Si près
À croire que le vent
N'est que la métamorphose
Des amours d'avant
Si près
La tête dans les étoiles
Le corps comme une voile
Et les pensées
Si près
De te retenir
Arbre
Entre tes branches
Je lis le ciel
à un cyprès chauve
Un vieil ami
Il était là
Au bout de la voie
Comme un vieil ami
Sous le ciel étoilé
Il gardait
Idées et secrets
Sous ses longs bras
Elancés
Chaque fois
Que je me promenais
Je le croisais
Et l'on se taisait
Mais je crois
Qu'au fond de moi
J'ai toujours pensé
Qu'il me comprenait
Un jour il est parti
Je ne sais pas
Ce qu'il est devenu
Un jour il est parti
Pour être peut-être
Un sapin de Noël
au vieux sapin
Peau à peau
Ma peau contre ta peau
Je ressens le temps
La caresse du vent
Et ta présence au présent
Ma peau contre ta peau
Je revis l'instant
Cette danse autrement
Et chaque jour différent
Ma peau contre ta peau
J'en oublie la vie
Le triste de la nuit
Et toutes les pluies aussi
Ma peau contre ta peau
Je revois l'envie
De ce jour qui s'enfuit
Mais je resterai ici
Ma peau contre ta peau
à un très vieux chêne
Blanchefontaine
Le chemin est droit
Le chemin est fidèle
Se promènent les pas
Entre la verdure et l'eau
Le paysage est paisible
Le paysage s'étire
Au-dessus de la Bonnelle
Parmi les temps passants
Chaque jour se respire
Chaque jour s'inspire
De nos passés pressés
De nos amours transis
Et le long de l'allée
Et le long des années
Chaque seconde passe
Se rappelant à nous
Dans l'automne frileux
Dans l'automne langrois
La promenade relie
Ceux qui s'aiment parfois
à quelques tilleuls
faux acacia
frappé par la foudre
il y a si longtemps
que j'ai oublié
seul mon corps se rappelle
la blessure noire
qui me traverse
et ces supports
qui me retiennent
pour que la mort
un temps s'abstienne
sur ce petit banc
tressé de bois
circule le temps
tout autour de moi
personne ne sait
ce que mes fleurs cachent
alors que me regarde
Notre-Dame
à un très vieux robinier faux-acacia
de branche en branche
en transparence
s'attachent les cœurs
les petits bonheurs
donne-moi la main
et retiens-la bien
cet arbre est fort
et nous porte encore
de ciel en ciel
même artificiels
je crois toujours
en ces jours d'amour
à l'arbre de l'amour
Saint-Faustin-Lac-Carré, QC
Vlei
L'amour se cache, l'amour pénètre jusqu'à l'âme du désert. L'éternité n'a pour pureté que la vérité. Le sable épouse le vent et tous ses tourments. Le ciel se noie dans les bleus et les ors des soirs. Et lorsque le silence vient, que la nuit en oublie la moindre vie, il est là planté telle une croix dans l'immensité d'un vide froid.
Je ne sais pas s'il sait, je ne sais pas si tu sais ce qu'il représente après tant d'années.
Là, sur l'onde orange et vacillante, il est droit, les bras tendus vers un azur pur. Il ne rêve plus, il ne pense plus, il ne croit plus. Son corps noir et mort retient la silhouette d'un absolu disparu. Et sur cette plage immense et sèche, il n'attend plus rien et plus rien ne l'attend.
C'est curieux, avec le temps, on finit par ne plus savoir qui l'autre est, ni ce qu'il pense...
Tout se perd et se transforme...
En rien.
à un vieil acacia du désert
Seul pleureur
Mon arbre est mort
Un jour comme l'on s'endort
Il avait bien encore
Quelques feuilles dorées
Il avait bien encore
Une certaine vitalité
Mon arbre est mort
Un jour comme l'on s'endort
Ils sont venus
Au petit matin
Ils sont venus
L'emportant au loin
Mon arbre est mort
Un jour comme l'on s'endort
Mais je le sais
Je le sais bien
Il restera en moi
Toujours enraciné
Mon arbre est mort
Un jour comme l'on s'endort
Je n'oublie pas
Je n'oublierai jamais
Où est cet arbre
Sous lequel je pleurais
à un saule pleureur