15/15
Du ciel à la mer
Peur
Le ciel est noir, le ciel a peur.
Je ne saisis pas ce soir
Est-ce le temps ? Est-ce une erreur ?
Reste-t-il un peu d'espoir ?
Le ciel s'écrie. Le ciel gémit.
La nuit arrive trop tôt.
Est-ce le jour ? Est-ce la vie ?
Reste-t-il un peu de beau ?
Le ciel se broie. Le ciel se tord.
Je ressens ce qui se brise.
Est-ce un éclair ? Est-ce la mort ?
Reste-t-il de la franchise ?
Le ciel est noir, le ciel a peur
Et il se verse de terreur.
Dernières pluies
Il a plu, de ces pluies froides et dures.
L'inconnu se noyait dans l'onde pure.
Il a plu. Alors que criait la nuit,
L'inconnu se déchirait dans le bruit.
Il a plu. Le ciel s'emportait de rage.
L'inconnu se dispersait dans sa cage.
Il a plu. Du ciel profond jusqu'au mont,
L'inconnu en perdait toute raison.
Il a plu. Dans la tempête félonne,
L'inconnu ne devenait plus personne.
Il a plu. Le silence laissait seul
L'inconnu dans la torpeur du linceul.
Il a plu, il a plu, il a plu
L'inconnu s'est perdu...
À la fenêtre
Je pensais avoir oublié,
Je pensais le temps venu.
Mais je ne pourrai le nier :
La terre restera à nu.
Il pleut sur les journées sombres.
Il pleut dans le plus grand silence :
Le temps avale nos ombres.
Chaque jour se perd dans sa danse.
À la fenêtre, vont les gens.
À la fenêtre, sans bruit,
Sous une pluie, sont les passant
De tes jours et de mes nuits.
Quand tes yeux sont de passages,
Quand tes yeux doucement s'enfuient,
Les trottoirs n'ont pour messages
Que les lumières qui s'ennuient.
Je pensais avoir oublié,
Je pensais le temps venu.
Mais je ne pourrai le nier :
La terre restera à nu !
Chanson morte
Une heure, je crois en toi.
Sous ces lumières d'automne,
Le ciel brouillé résonne
De toi et de notre foi.
Une heure au bord de mer,
Chaque vague laisse faire
Sur le sable et sur la pierre
La seconde et son envers.
Une heure, le jour est mort.
Sous le ciel et une étoile,
Un bateau et sa grand-voile
T'emportent loin de ce port.
Une heure, je crois en toi.
Sans ses lumières d'automne,
Le ciel souillé raisonne
De notre manque de foi.
Une heure, une seule,
Pour croire en Dieu.
Cet amour est veule
Loin de nos yeux...
05h05
Nous n'avons qu'une vie
Nous n'avions qu'une envie
Nous savions que l'amour
Se transmettait toujours
D'une simple caresse
D'un soupçon de tendresse
Nous n'avons qu'une vie
Et un jour on l'oublie
Et là...
Les autres vagues se dissolvent...
La mer n'est plus qu'une étrangère.
Les âmes perdues se résolvent
À ne plus être. Et là, amère,
La nuit se balance en cadence
Déchiquetant tous les instants.
Et là, dans cette ultime danse,
L'écume s'infuse de blanc.
La lune n'a plus de visage
Le noir s'étend lentement et
Absorbe les riens de courage.
Et là, sans le moindre secret,
Les autres vagues se dissolvent...
Le temps perdu
Long, long, le temps passe et efface
L'écume sur les lents rivages.
Long, long, il s'agite, sauvage,
Sur le sable blanc qui se tasse.
Lent, lent, le temps passe et divague
Privé de bien, privé de force.
Lent, lent, il s'installe et s'efforce
De repousser bois morts et algues.
Long, long, le temps passe et se voile
Lissant les blanches cicatrices.
Long, long, il s'invite et se glisse
Sous la lumière des étoiles.
Entre temps
À travers la fenêtre
Un soupçon de lumière
Fait trembler tout son être
D'un unique peut-être
S'imagine peut-être
Que danse tout son être
Quand son corps de lumière
Danse à la fenêtre
Assez
Vague après vague, se suffit le jour.
Calme est la mer dans les reflets du temps.
Mais chaque nuit se suffit-elle assez
Dans les reflets d'une étoile d'écume ?
Vague après vague, dans les rouleaux sourds,
Le temps se noie oubliant le présent.
Mais chaque nuit se suffit-elle assez
Lorsque l'étoile n'est plus qu'une brume ?
L'île au bout de l'océan
Une île au bout de l'océan
Recouverte de neige
Une île aux longues plages beiges
Recouverte de temps
Parfois les vagues de la mer
Mélangent leur écume
Abandonnant un goût amer
Sur la terre et ses dunes
Lent de vague en vague et sans trêve
Le voyageur rêve
Rêve dans son noir esquif blanc
D'une île au bout du temps
Perdue en mer
Que faire pour plaire ?
Quel est le message ?
Je ne saurais dire,
Je ne saurais faire
Ce que je désire
Je ne saurais être
Je ne saurais taire
Ce qui peut paraître
Serais-je la mère ?
Je me suis perdue
M'as-tu reconnue ?
Je suis seule en moi.
Qui suis-je pour toi ?
Peur
J'ai peur que l'eau ne coule plus,
Que le temps un instant s'arrête
Ou qu'un instant il continue.
J'ai peur de ne pas être prête,
Que la vie me perde et m'emporte
Ou que mon cœur batte si fort
Que claque à nouveau cette porte.
J'ai peur de connaître sa mort,
De ne plus pouvoir respirer,
De n'être que l'obscurité
Et de finir par le briser :
La pluie n'a qu'une vérité.
J'ai peur de n'être que ce noir,
Qui veut ce blanc absolument.
J'ai peur qu'il devienne un espoir,
Mais je suis mer complètement.
Plus légère que le vent
Plus légère que le vent
Plus douce que l'étoile
Plus calme que la pluie
Plus tendre que le temps
Je t'attends dans la nuit
Moins froide que l'air
Moins chair que la lune
Moins tard que la rosée
Moins vraie que l'instant
Je te perds dans l’amer
Vers la mer
Le temps coule comme l'eau claire
Qui coule de pierre en pierre
Mêlant chaque lumière
Et chaque rivière
Le temps coule jusqu'à la mer
S'écoule de terre en terre
Mêlant tous les enfers
De ce qu'est l'éther
Le temps coule comme on s'enterre
En mer
C'est la houle qui s'enroule
Et qui m'enroule et me coule
C'est la houle si sauvage
Qui m'en cage de sa rage
C'est la houle qui oscille
En tant de vagues hostiles
Sur cette plage de sable
Je me noie dans cette fable
​
​
​
​
​
​
​