vides
Être vivant
Lorsque le temps est mourant,
Lorsque les amours s'achèvent,
Lorsqu'elles ne sont que rêves,
Que le désir n'est que vent,
Lorsque les mots sur la grève
Noient dans les sables mouvants
Le sens qu'ils avaient avant,
Lorsque sans aucune trêve
La peur est néant, un trou
Béant vers on ne sait où,
Lorsqu'à toutes les fenêtres,
Ne se voient que les rideaux
Fermés devant un ciel faux,
Vivre est l'ennemi de l'être !
Les yeux perdus
Les yeux perdus aux bouts de la terre,
Les idées brulées à blanc,
Je ne sais ce que la mer espère
De ce silence ondulant.
Les mots ne sont que vipères
Et ignobles serpents dérobant
Au temps ce que les mystères
Pouvaient avoir de troublant.
Tu sais que m’étouffe ton silence
Lentement ignorant l'innocence
De nos amours de papier.
Tu sais ce que produit tout ce vide ;
Le Ciel a souffert de cet acide
Bien avant de perdre pied.
Stockolm (Vu de la chaise)
Je t'aime, bourreau !
Je ressens le vide
Pénétrant, lucide,
Par-dessous ma peau.
L'heure fatidique
Sonne tristement
Oubliant le temps,
Ce temps hérétique.
Nous sommes errants !
Par-dessus la table,
L'amour contestable,
Tout ce temps amant,
Se perd dans sa chute.
D'anges en démons,
Ce que nous aimions,
En moi se dispute.
Je t'aime, bourreau !
Je sens ma traîtrise
Devenir bêtise.
Cet amour fardeau
Retient ta lumière.
J'attends tout ton mal,
Désir amoral,
Gagné sous tes pierres.
Je veux me noyer
Dans tout ton vertige,
La douleur l'exige.
Maintenant attaché
À tes coups funèbres,
Je suis ton fardeau.
Je t'aime, bourreau,
Au bout des ténèbres !
L'amour improbable
L'amour a perdu son nom,
Il est tombé de son trône
Et, maintenant, fait l'aumône.
Non, il n'y a rien de de bon !
À terre, le regard fixe
Dans les yeux bleus de la nixe,
Il désire encore voir
Une étincelle sous l'arbre.
Mais ses yeux offrent le marbre,
Un néant pour décevoir.
Le temps passé sans repère
Se dilue ignoblement
Dans les vides sentiments
De l'improbable chimère.
À la porte de la chapelle
Au pied de la paroi creuse,
Je sens encor ses cheveux
Et ces secondes heureuses.
Aurais-tu dit : « Je le veux ! » ?
Maintenant le temps grimace
En me laissant hébété.
Je vois qu'il passe et qu'il passe
Avec d'autres vérités.
J'ai toujours le sang qui se glace,
L'extase n'a plus de place.
Les pas ont perdu les pas
Et le vide des « je t'aime »,
A trouvé son anathème ;
Il crie : « Je ne t'entends pas ! »
Plaintes inutiles
La vie s'est prostrée
Oubliant les jours heureux,
Fermant les yeux sur les jeux
De ta voix voilée.
Le temps sans pareil
Donne aux vides qui flamboient
Ces amours qui ne se voient
Plus loin du soleil.
L’espace est l'impasse
Où s'est retiré le ciel.
Sur son corps superficiel,
Le plaisir s'efface.
La vie n'a de beau
Que la lumière sublime
Liant la mort à l’abîme
Au fond du tombeau.
Païen
L'amour de cette flamme
Se lit sur mon corps engourdi.
C'est en perdant mon âme
Que je me suis trouvé ici.
Perdu le temps, perdue
La vue, perdue sur le chemin,
Ma vie s'est morfondue.
Il ne reste plus dans ma main,
Dans ce froid que la peine.
Elle règne sans peine
Oubliant les toujours,
Oubliant le velours.
Pourtant ma croyance authentique
Me laisse en son vide mystique.
Ailleurs - si loin
Ce n'était qu'une idée
Pensée par une fée.
Et je l'ai regardée
Sur le chemin, serein.
Se promenait ma main
Librement dans sa main.
Une envie insensée
Nous emmenait rejoints
Par le mont, la vallée
Et cette voie rêvée.
Pas de choix, pas de point,
La folie embrassée,
Vie et vide conjoints,
C'était ailleurs - si loin...
Aimer sans savoir
I
L'amour serait-il sage ?
Je ne sais dans ces pleurs
Quel serait son visage,
Quel était le passage...
Entre pierres et fleurs,
Se précise la joie,
Se change le passé
Du regard qui se noie.
Quand les bras se déploient
Serrant l'éternité,
Je ne sais ce que danse
Chaque peur dans son sang
Quelle serait la chance ?
Quelle serait l'absence
D'un amour expirant ?
La volonté divine
De ces temps délicieux
Scella sur sa poitrine
Une simple doctrine :
« Je t'aimerai pour deux ! »
​
II
Si notre temps regorge
D'amours déracinés,
Ce n'est que dans la gorge
Qu'un silence se forge.
Les mots taisent, damnés,
L'embryon de ces rêves,
Le paradis... L’Enfer...
Se mélangent sans trêves,
Se mélangent et crèvent
D'un silence de fer
Chaque pensée conjointe,
Chaque désir en nous.
Maintenant la mort pointe
L'envie de son étreinte,
Le plaisir du dégoût...
Je ne sais dans la peine
Quel était cet émoi,
Qu'elle était cette reine
Rendant la coupe pleine.
Je sais qu'elle est en moi !
Au clair de la lune
La même lune, la même terre,
Et pourtant, dans chacun des détails
S'agrandit la faille sans repères.
De grisailles et brouillards, les rails
Du temps nous éloignent. Et prospèrent
La mort et son silence, fermail
De mes mots sans audience. Gemmail
Et vitrail divisant la lumière,
Tes yeux sont égarés en chemin
En oubliant dans le blanc matin,
Désirs latents, envies surannées
Et sourires vieillots. Appauvri,
Le clair de lune se perd d’années
En années sur ce monde maudit.
Réflexions
Le passé sur les eaux tranquilles
Diffuse le vieux paradis.
Les quelques images dociles
S'effacent lentement, ici,
Au profit de ces autres, viles
Agitations des amours qui
Persistent. D'une saveur servile,
Se dessinent les douleurs si
Profondes que leurs vagues fortes
Emportent le ciel. Se confortent
En ces reflets tous les regrets.
Le silence noir de cette onde
Engloutit en nous les secrets
Des réflexions de notre monde.
Incertain
Savait-on le temps agonisant ?
La lumière blanche
Dans notre silence suffisant
Découpait en tranches
Tant de désirs de noirs et de blancs.
L'espace, dans ce ciel inconnu,
Menait à l'impasse
Tous ces chemins aux pas incongrus.
De ces brèves traces,
Pourtant, l'amour naissait, absolu.
Imprévu, le puissant battement
D'une simple flamme
Surgissait du mal pour autrement
Entrevoir la femme.
Savait-elle l'amour évident ?
Le vide n'est qu'étrange,
Incertain est son ange...
Désolée
Des regrets du passé
À l'horreur d'être en faute,
Dieu que la honte est haute !
Je ne veux regarder
Ce qu'ont été ces jours,
La tête hors des épaules
Et mon corps sans contrôle.
J'ai laissé à l'amour
Le droit d'ouvrir la porte.
Que le diable m'emporte
D'avoir cru en tes mots,
D'avoir été sensible
Dans ma vie impossible.
Mon compagnon a beau
Mettre en moi ce qu'il aime,
Je ne suis plus la même.
Il veut réparation
Que je ne sois plus peste
Dans chacun de mes gestes.
Il voudrait l'émotion !
Je crois que j'ai eu tort
De prendre ta confiance,
De m'offrir en conscience,
De laisser tout au bord
De mon cœur le chemin,
De mon âme apparaître
Ces instants de mon être
Juste au creux de ta main.
Je le sais, tu le sais,
Tant de fois convaincue
De n'être qu'ingénue,
Son regard me soumet.
Je me tais, c'est mon choix.
Ma confiance emportée
Dans le flot des années
Peut s'oublier en toi.
Bêtise de l'amour
Sur cette terre ferme,
Je coupe et mets un terme
À ce qui est toujours
Des regrets du passé...
Paix extérieure
I
Dans le grand livre de la vie,
Existes-tu, petite amie ?
Le chemin n'est que tortueux.
Il se grimpe de pierre en pierre
Espérant toucher la lumière
Et ce ciel bleu majestueux.
Sous ses étoiles innombrables,
Une seule est incomparable.
Sur terre est tombé un morceau,
Un morceau dont le feu superbe
Réinventait chaque brin d'herbe
De quelques simples gouttes d'eau.
Dans le grand livre de la vie,
Elle m'offrait sa main amie.
​
​
II
Dans le grand livre de la mort,
Existe-t-il un autre sort ?
Le chemin n'est que ce silence
Où ne règne que la raison.
La passion morte pour de bon
Se nourrit maintenant d'absence.
De tous nos rêves les plus fous,
Chacun nous ramène à genoux.
Aimer ne peut être facile.
Quand nos regards sont assassins,
Le vide bâillonne nos mains
De mille et un liens infertiles.
Dans le grand livre de la mort,
L'amour ne peut avoir que tort
​
III
Dans le grand livre de la peur,
Existe-t-il un autre cœur ?
Les mots se perdent et se terrent.
Ils perdent les couleurs d'avant
Tout en laissant nos cœurs ballants.
Il ne nous reste que la guerre.
Le temps cherche les sentiments
Dans les décombres des instants.
Ce ne sont que des âmes vides
Cachant le malheur intérieur
D'un simple sourire extérieur.
L'amour n'est jamais impavide.
Dans le grand livre de la peur,
Est-ce que bat toujours ton cœur ?
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