
Reliefs
Au sommet
Une pierre lancée de la falaise, une pierre comme une autre, une pierre comme aucune autre, qui ricoche et ricoche encore entre les parois acérées du temps, une pierre dure et fragile comme le serait un sentiment d'amour, une pierre dure et docile comme le serait l'abandon de soi face à l'incertitude de l'avenir...
Les yeux rivés sur le sommet de la montagne, je la regarde tomber à l'infini et battre et battre encore comme si elle ne portait pas en elle la mort...
Ce n'est « plus qu'un court instant - mais interminable - de douleur »*.
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Plaine
Silence,
Se dessine dans la plaine
Un flot de gris
Et l'on perçoit à peine
Ce jour qui nous déçoit.
Hier
Déjà, nous ne le savions pas,
Le paysage se dissimulait
Derrière ce rideau froid
Etions-nous autres ?
Demain,
Quand la nuit tombera
Que penserons-nous
De ce que nous n'étions pas ?
Tout s'efface dans cette plaine.
« Mais où donc est passé le temps ? »*
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Rivage
Le lancinant mouvement du temps
Se perpétue dans les vagues.
L'horizon plonge à l'infini
Dans les songes plats de la mer.
Au loin, une frêle voile
Se détache encore des flots.
Dans le chant lent des eaux
S'écrasant sur le rivage,
Se dessinent sur la plage
Les ondes du temps qui passe.
« Parfois les yeux chavirent
En suivant le cœur »* qui part.
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Offerte aux vents
Un silence
Sur les montagnes danse
Il croit que le temps passe
Il croit que le temps joue
Mais il suffit d'un regard
Pour que la montagne se décoiffe
Qu'elle perde ses couleurs
Qu'elle perde son ardeur
Un silence
Sur la montagne s'étend
Il croit que le jour brille
Il croit que le jour file
Mais il suffit d'un mot
Pour que la montagne écoute
Qu'elle retienne ses battements
Qu'elle retienne son souffle
Jusqu'à ce qu'
Un « courant d'airs tourne les pages »*
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La presqu'elle
« Vivre peut satisfaire »*
Mais qu'être sur ce bout de terre
Être peut satisfaire
Mais qu'aimer sous ce bout de ciel
On espère et on rêve
On regarde et on se tait
On pense et on omet
On fait et on part
Dans les murmures du vent
On peut vivre
On peut être
Ce que l'on décide
Ce que l'on aime
Mais sur ce bout de terre
Et sous ce bout de ciel
Tu ne pouvais être que presqu'elle
Entourée par la mer
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Le lendemain matin
« Silence de nuit »*
Ce matin me tient par la main
Je ne retiens d'hier
Que la douceur du chemin
Sur mes épaules se pose
Le début du jour
S'oublie déjà
La montagne au loin
Sur mes épaules se pose
L'ombre de sa main
Je sens maintenant
Le poids de ce qui me manquera
Mais j'avance
D'un pas décidé
Et ne me retournerait pas
De peur de voir
Le jour se lever
Sans moi
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Ascension
Le jour se libère du temps
Le chemin serpente en nous élevant
La pierre calcaire
S'harmonise avec le ciel
La forêt se dévoile
Doucement sous nos pas
Avant de s'effacer
Au fur et à mesure
De l'ascension
Je crois que je sais
Ce qui m'attends au somment
Mais j'avance sans douter
Arrivé au sommet
La tête dans les nuages
Au bord de la falaise
Le ciel et le monde se confondent
Absorbés par la brume
« II reste ce beau vide »*
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Au milieu d'un chemin dessiné par Lucie
Le jour est précieux
L'heure est précise
Le bonheur est caché
Dans les anfractuosités
Du timide chemin
Je lis dans sa main
Les mots enfantins
Les heures divines
Et le ciel qui décline
Je lis le bonheur
Un peu de peur
Et ce grand désir
D'un autre avenir
Le jour est précieux
La nuit indécise
Je vois les étoiles
Où « comme des fleurs les mots »*
Nous invitent aux rêves
Nous fermons les yeux
Ouvrons notre cœur
L'automne nous propose
De nous arrêter
Au milieu du chemin
De nous attendre
En nous tendant la main
Le jour est précieux
L'attente exquise
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Air libre
Octobre s'habille de ses couleurs tendres. Heureuse, tu m'emmènes sur ton chemin au cœur de la combe. Tes pas se glissent entre les feuilles qui bruissent. L'air frais nous transporte jusqu'au croisement où la vieille ruine nous attend en silence.
Le jour s'arrête là, un instant...
L'automne nous recouvre de sa lumière colorée et le temps se perd en tant de douceurs... beaucoup plus que ce que nous pouvions imaginer. A travers les rayons de soleil, il mêle rires et sourires sans que l'on pense à l'importance du moment. « On croit guider le vent »*…
Je pose ma tête sur ton ventre...
et laisse le ciel m'envahir...
Impossible de mentir !
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« Dans la nuit et le demi-sommeil pensif »*
La lune boit cet air froid de novembre
La lune boit ce silence en toi
Et la montagne noire allonge son ombre
Jusqu'au plus profond de ce que nous sommes
Deux êtres étroits en somme
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Neige de novembre
La montagne est là
Plantée dans le froid
« le prunus ouvre noctambule »*
Ses bras remplis de ciel
Et de tout un tas d'étoiles
Regarde ce qui reste de nous
Peut-être ce petit chemin
Au creux de la voie lactée ?
Peut-être ce souffle d'air
Au cœur de ces bras ?
On ne sait pas
Ce que le temps décidera
Il neige maintenant
Des étoiles sous nos pas
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D'une minute à l'autre
Il est des instants
Où un mur nous sépare
Aussi géant qu'invisible
La peur n'a pourtant
Pas la force de l'amour
Il est des instants
Où commence l'assurance
D'une fin invisible
Les craintes naissent ainsi
Dans le petit jour
Il est des instants
Où « ton souffle au goût de fruit »*
A l'amertume de la mort
L'inquiétude et la honte
Communient dans ton corps
Il est des instants
Où l'on pourrait croire
Infranchissables certaines limites
L'espoir est cette violence
Qui permet de renverser tout
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« Qu'attendre de la mort »* ?
La lumière traverse les branches
Du vieil arbre nu
Il fait froid
Un froid glacial que l'on ne peut pas oublier
L'arbre ne sait pas
L'arbre ne ressent pas
Il est là sombre
Planté dans la lumière
De ce jour naissant
Il ne sait pas
Qu'il ne reverra pas la lune
Qu'il ne sera bientôt plus là
Il ne sait pas
Qu'il n'a plus le temps d'être
Ni celui de rêver
Il laisse la lumière l'embrasser
Une dernière fois
Elle ne sait pas
Qu'elle ne reviendra pas
Sur ses pas
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Quand tu construis ce que tu hais
Le temps n'existe plus
N'existe pas
Je le sais
Tu ne fuis pas
Tu construis
Ce que tu connais
Ce mur d'indifférence
Cette haine de ce que tu aimes
Tu t'obstines
A te faire mal
Jusqu'au bout de toi-même
Et je t'aime
« Je t'aime en te perdant »
Et j'espère
Que tu sauras
Être ce que tu es
Vraiment au fond de toi
Cet être qui aime
Cet être qui s'offre
Loin de cet être qui se tait
Loin de cet être qui se hait
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Tout est courage
Ton cœur bat
Mon cœur bat
D'un mot à l'autre
D'un mot dans tant d'autres
Plus fort que l'instant
Plus long qu'un présent
Dans chaque respiration
Dans chaque inspiration
Le vers console
Le vers s'envole
Vers des cieux si bleus
Vers des yeux heureux
Sans pensées
Sans idées
Sauf celles d'un autre âge
Sauf celles d'un court âge
Faut-il retenir ses idées ?
Faut-il contenir ses pensées
Comme on retient un animal ?
Comme on contient tout le mal
On se perd dans la fureur
On se perd dans nos erreurs
Aucun courage ici d'ailleurs
Aucun courage seulement des peurs
Juste un amour et c'est fou
Juste un amour et c'est tout
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« Le courage sera de priver le poème »*
Du goût de tout
sur le goût de rien
On s'aime
c’est le bien ?
Le courage est en nous
il est nous
C'est tout
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