
Au fil des eaux
Chaque jour apporte ses gouttes d'eau,
Chaque jour nous apporte un peu de beau...
Quand notre horizon ne devient qu'un point
Dans quelques baisers de plus en plus loin,
On s'aperçoit que le temps toujours noie
Ce que l'on croit, ce qu'était notre voie,
Ce que nous pensions être le plus sûr,
Ces mots, ces gestes, ces rêves si purs.
Notre regard perdu dans les nuages
Et la montagne en guettant le passage
D'un nouvel arc-en-ciel, nous guettons
Chaque instant la beauté de l'abandon
Et nous attendons à nouveau qu'il pleuve.
Avant, les mots s'invitaient dans ce fleuve.
Ils en imaginaient tous les courants
Du petit torrent jusqu'à l'océan
Avant, de la montagne à la vallée,
Ils peignaient de bleu même les allées
En s'imprégnant de la beauté du ciel
Et ces mots, tous ces mots juste essentiels
Fécondaient la mer, fécondaient la terre
Sans regarder ni devant, ni derrière
Ni les bois, ni les pierres, sillonnant
Lentement entre tous les éléments.
Et ces mots, tous ces mots simplement justes
Dans les jours les plus beaux ou les plus frustes
S'étiraient, s'étiraient jusqu'au soleil
Même dans ces quelques jours en sommeil
Oubliant sans maux ce qu'était le temps.
Doucement,
Comme un arbre
De ce marbre
Nous rendant
Si géants
Que nous sommes
De ces hommes
S'endormant
Dans le temps
Blanc et rose
Mon cœur n'ose
Être là
Dans tes pas.
Maintenant dans le coffre de turquoise,
S'écrivent en couleurs sur une ardoise
Grise, nos mots du plus beau au plus fort,
S’écrivent nos amours et notre sort.
Au loin se perçoit la houle
Et quelques larmes qui coulent
Quelques ors et des rubis
Et un rien de paradis.
Au loin, la mer est levée.
Elle est bleutée, obstinée
Et dans son sable promis
Se cachent les mots d'ici
Le temps nous parait si proche
Qu'il est serti dans la roche
Se glissent et se faufilent les eaux
Entre les arbres et les chants d'oiseaux.
Elles dansent, elles dansent et dansent
D'un caillou à l'autre et elles avancent
Tonitruantes et si impatientes
Dans tous les creux et toutes les descentes.
Elles avancent sans prendre le temps
Oubliant chacun des reflets d'argent.
Quelques feuillages pour se cacher,
Quelques rayons pour chercher l'été.
Puis le chemin suit la pente
C'est une longue descente
Rien ne saurait s'arrêter
Dans cette course. Arriver
Le plus vite possible et
S'engager. Ne pas penser,
Juste courir dans la pente
Jusqu'au bout de la descente.
Et puis, voilà, c'est le calme plat.
Et la plaine les prend dans ses bras.
Les eaux continuent,
Platement saluent
Les hommes des rues
Avant de partir
Sans aucun désir
Et de se jeter
Dans les flots grisés
Du fleuve du temps,
Les eaux inconnues
Des rêves d'antan