
expiation
Adieu
Je pars,
Demain,
Loin du hasard
En fermant ma main.
La tempête ?
L'enfer ?
Je choisis la fête...
M'évader sur la mer,
Sur une île déserte
Oublier le volcan
Pour une onde verte.
Un an, mille ans.
Une seconde énorme
Portée par le vent
Dans l'instant difforme
Du temps d'avant.
Je pars,
Sans voir,
Sans un écart
Sans autre au revoir
Une histoire ?
Un faux-semblant ?
Laisser la gloire
De ce sale moment.
J'omets la pourriture
De ton âme, de mon cœur,
Pour que la nature
M'abandonne au bonheur.
Mon idée irréelle
Se noie, c'est sûr,
Sur la terre réelle
De mes yeux d'azur.
Je pars.
Musique de voyage
Violon et hautbois
Un souffle sur les cordes
Pour que la pluie concorde
Avec le vent du bois
Que les notes défont
Hautbois et violon
Chantent un peu de toi
Hautbois sans violon
Ton corps joue sans un bruit
Sous mes doigts tout du long
Jusqu'au bout de la nuit
C'est un rêve de toi
Violon sans hautbois
Qui toujours me séduit
Monde merveilleux
Monde merveilleux
Posé au bord de tes yeux,
Je revois naguère
Ce que l'amour pouvait faire :
Un délice exquis,
De ce dessein, le croquis.
Les petites choses,
Merveilleux boutons de roses,
Voulaient l'inconnu
En découvrant l'autre nu.
Le ciel et la terre,
S'imaginaient le mystère.
Un bout de papier
Pour simplement recopier,
Le désir, l'envie
De jouir de cette vie,
Plongeant le regard
Dans l'amour de part en part.
Sans un seul mot dire,
Juste un délicat sourire.
Le temps évident
Imaginait le présent :
Monde merveilleux
Complainte de la folie
Les mots ne sont que des mots
Entre le vrai et le faux.
La folie
Est de croire qu'ils sont beaux.
Tout là-haut,
Au sommet de notre envie,
Les mots sont la tyrannie,
L'alchimie,
Qui nous emporte au tombeau.
Ce ne sont que des oiseaux
Portant en eux l'agonie.
L'amnésie
Des miens est ton renouveau.
D'un arbre à la lune
Perdu dans une étoile
Perdu quand se dévoile
Chaque léger matin
Cherchant dans le satin
La fraîcheur de la mousse
Perdu sur ta frimousse
Perdu en douce encor
Cherchant le vieux trésor
La beauté du mystère
Je t'écris de la terre
Désir de peur
Le désir est d'argile
Sous ton doigt indocile
Ou le mien malhabile ;
Il est né sans effort.
Une envie mutuelle
Dans tes yeux de rebelle,
Dans ma foi parfois belle,
L'amour sait être fort.
Avant que tu ne mues,
Douce, tu m'habitues
Au temps et t'évertues
A ce que je le vois.
Au creux de ta prunelle,
Je sens que tu es celle
De mon ombre éternelle
Et, mon dieu, je te crois.
Le désir se consume
Dans l'étrange amertume,
L'amour est cette brume
Où je n'existe plus.
Ton envie devient vide.
C'est un désert aride
Où se noie chaque ride :
L'amour a disparu.
Il n'est plus qu'une image
Où règne la peur sage.
Le plus cher des cordages
Te retient en tremblant.
Dans la peur, il t'adore,
Lentement te dévore
De l'aurore à l'aurore,
Et te tue en t'aimant.
Mort
Le temps passe, passe, passe loin d'elle.
Est-elle surnaturelle ?
Et j'écris, j'écris, j'écris tant de mots
Disparaissant dans les flots.
Ces mots ont perdu dans son cœur leur place
Qu'il n'en reste rien, rien, rien de plus.
Elle a égaré la trace
De tous ces temps malvenus.
Quand sa tête posée sur mon épaule
Ouvrait la voie à ce nouveau chemin,
J'ignorais ce que sa geôle
Enfermerait dans le cœur de sa main.
Il ne me reste que cette caresse
Echappée dans le temps d'une déesse.
Comment puis-je voir, dans le noir, l'espoir
Que le soleil se relève le soir ?
Je sais son amour froid comme la pierre
Dans l'absence de lumière.
La mort est-elle le bien ?
Maintenant je n'attends que le temps ose,
Ouvrir un autre regard dans le sien...
- L'amour est-il quelque chose ?
Silence de l'être
Le silence des mots, je suis abandonné.
Aucun bruit, ni écrit : je suis un inconnu.
Le silence des yeux, tu les as refermés.
Ni image, ni son : tu ne m'as pas connu.
Le silence des mains, je suis seulement nu
Avec pour horizon une éclipse de ciel.
Le silence du cœur sur moi s'est étendu...
Le silence du temps qui s'enfuit dans le fiel
S'étend assourdissant dans l'espace infernal.
Le silence de l'âme est l'asservissement.
Tu ne peux pas savoir comment grandit le mal.
Ton absence invente un éternel châtiment.
Le silence de l'être est un amour létal.
Monologue d'un fou
Le monde est laid... Je suis laid.
Et l'amour, aussi, il l'est.
Cette laideur peut s'écrire
En un sourire, en un rire.
Tu ne me vois que ventru,
Un immonde malotru.
Lorsque l'amour nous rattrape,
Ce n'est qu'une chausse-trappe.
Pour les plaisirs ingénus,
Ces désirs sont malvenus.
Dans ta parole posée,
Ce sont des mots de nausée
Qui sont renvoyés vers moi.
Pas de doute, aucun émoi,
Je ne suis qu'un misérable
Porteur de l'inacceptable.
Alors, chaque mot usé
Est pour toujours accusé
De perpétuer le crime.
Planté au fond de l'abîme,
Je sais : « tu n'existes pas ! »
Et je meurs de savoir ça.