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L'horloge

Un an a passé.
L'eau s'est écoulée,
Le pont, écroulé.
La pluie a cessé.

Une année encore
A chercher le port,
Maudire le sort,
Attendre la mort.

Ces quelques secondes
Qui ont brisé l'onde,
Effacé un monde
D'âmes vagabondes,

Sont parties en leurres
Dans toutes nos peurs.
Il reste les pleurs
Plus forts d'heure en heure.

Dernier
 

Derniers moments, la main sur le levier
Regards d'espoirs, l'avenir à nos pieds
Hésitations, le temps ne t'attend pas
Sensations, se tenir dans nos bras

Dernière fois, un et un ne font qu'un
Comme un délice encore dans ton parfum
Cette émotion d'être uniques sur terre
Prolongation de nos cœurs dans l'hiver

Seul dans tes yeux, j'aperçois l'infini
Un grand ciel bleu aux contours définis
Complicité des ombres embrassées
Simplicité de nos feux enlacés

Un au revoir, deux sourires radieux
Dernier regard d'un instant merveilleux
Sans le savoir, se termine l'histoire
En un départ, planté sur un trottoir

Encore un dernier baiser à ce temps
Gentil qui s'effacera insensiblement

Tiroirs
 

Rangée, cachée au fond de tes tiroirs,
Sous la poussière est terrée notre histoire.
Elle s'entasse quand le déplaisir
Transforme en sombre passé l'avenir.

Un manteau beige autrefois oublié,
Là, un vieux tee-shirt au bleu délavé,
Un pull, col roulé, si bon à jeter,
Ou ce pantalon qui s'est décollé,

Un soutien-gorge aux reflets violacés
Et une culotte au satin passé ;
Tant de vêtements à débarrasser,
Tant de sentiments que tu dois lâcher.

A quelles pensées seras-tu menée
Quand, ces guenilles, tu retrouveras
Toutes déchirées dans ce vieux fatras ?
Regretteras-tu toutes ces années ?

Pot de miel
 

Tout ébréché sans son couvercle,
Il est resté sur l'étagère.
Taisant son âme messagère,
C'est la poussière qui l'encercle.

A un moment bouleversé,
Il a oscillé sans oser.
Il est tombé, a explosé.
Son contenu s'est déversé.

Rien ne répare les cassures.
Le doré a laissé la place
Au noir et blanc dans son espace.

On ne refait pas le passé
Car ce qui a été cassé
Aura de tous temps des fêlures.

Vol
 

Comme un délicieux voyage
Voguant entre les nuages
Reliant montagne et ciel
Je suis colombe de miel

Inspirant du ciel l'essence
En caressant tous ses sens
Je dispute à la nature
Le droit de mes aventures

Je vole dans l'idéal
De mon espace vital
Quand meurt mon cœur un matin

Instant subit loin du sol
Comme abattu en plein vol
Par le regard d'un mot fin

La branche
 

Là, vit un arbre jeune et vivant.
Il fleurit régulièrement.
Il a de beaux enfants souriants.
Il aime s'ouvrir dans le vent.

Mais il a une nouvelle branche,
Une étrange branche toute blanche,
Un vieux rejet qui n'a pas sa place.
D'un coup sec, elle scie la menace.

La branche se détache de l'arbre.
Sans bruit, elle se meurt dans la nuit.
Coupée, la branche devient cercueil.

Qu'importe si elle n'a plus de feuilles,
Qu'importe si elle n'a plus de fruits,
Qu'importe... Elle a sauvé son arbre.

Murmures
 

Au temps impur, ton cœur susurre
Avec le vent des mots chantant
L'or innocent. Alors je sens
Un bleu azur qui me capture.

Mais je mesure en tes blessures
Que la justesse est la tendresse.
Délicatesse est la caresse
Comme un parjure, une fracture.

En oscillant du noir au blanc
Il murmure : "je t'aime tant".
Il en oublie quelques fissures.

Cette faiblesse est la promesse
De la tristesse et, dans l'ivresse,
J'en perds l'amour qu'elle procure.

 

 

 

 

Quand les vérités
 

Quand les vérités ne sont plus que des mots,
Qu'elles perdent sens sous les nombreux assauts,
Que dans leurs valeurs ne survit que la peur,
Que peut-il rester, si ce n'est le malheur ?

Quand les vérités deviennent incontrôlables,
Que, dans tous tes mots, la mort devient palpable,
Que, dans tes gestes, le sens de la vie perd
Tous ses repères et nous plonge en enfer,

Que tous les efforts restent des lettres mortes,
Que le réconfort voit se fermer la porte,
Il ne reste rien, chacun des sens s'efface.

Il ne reste rien ! Le vide prend la place.
Quand les vérités deviennent des mensonges
S'allument les peurs et s'éteignent les songes.

Il pleut des larmes
 

Le jour est triste et gris : il pleut des larmes.
Un ciel profond, lourd, qui est fier,
Il ressemble à demain ou à hier
En enfonçant son eau de tous ses charmes.

Les gouttes, une à une, me percutent,
Mon cœur ressent mille baisers acides ;
Ce ne sont plus que des bouches avides
Qui se délectent de chaque minute.

L'eau est fraîche et épaisse, elle m'oppresse.
Sa caresse est âpre, toute en rudesse.
Lentement, je m'affaisse en me pliant
Sous le poids de cette eau, le poids du temps.
Elle, telle une tempête, m'emporte
Si loin de ce ciel bleu qui se déporte.

Le voile intérieur
 

Tu me grondes, je crie mais je l'accepte.
Un mot, un coup, je ne dis rien, je pleure.
Tu continues, je m'enferme des heures.
Je m'habitue, j'accepte d'être adepte.

Je me soumets au fur et à mesure
A tes désirs en oubliant ma vie.
J'abandonne au fil du temps mes envies
Pour que perdure en moi ta dictature.

Je me voile, cachée dans la famille,
Sans protéger des blessures mes filles.
Porte fermée, j'ai perdu ma confiance.
Ne rien casser, rester à la maison,
J'aurais toujours une bonne raison
D'accepter que ce soit ma déchéance.

Pierre
 

Je suis fils de Pierre
Sans en être fier.
Caillou, je suis.

J'étais endormi
Au creux de la vie
En une nuit.

Aucune pensée,
A peine enterré
Sur un chemin,

Quand elle est passée
Elle m'a touché,
Pris dans ses mains,

Puis m'a réchauffé.
Enfin embrassé,
Et emmené.

Elle m'a coupé
Et m'a détaillé
Pour m'observer.

Une fois terminé,
Elle m'a jeté
Au fond d'un trou.    

Devenir poussière
Est la mort entière
De tout caillou...

Au fond de la terre,
Voici que s'enterre
L'amour céleste.

Je ne pense pas,
Je ne rêve pas,
Caillou je reste.
 

Ce soir
 

Ce soir, le ciel est blanc,
Il neige des étoiles.
L'infini se dévoile
Au milieu de mes tourments.

Gorgée de blanc, de noir,
La montagne prolonge
L'univers de mes songes
Teinté de désespoirs.

Déjà, le froid glacial
M'enveloppe et me broie,
Dans le ciel, je me noie.

Sous la lune bestiale,
Une étoile farouche
Lentement se recouche.

Anniversaire
 

Il existe des anniversaires
Que nous ne souhaiterions pas faire,
De vieilles bougies dissimulées
Que nous ne voudrions souffler.

Il existe des anniversaires
Qui pendant longtemps nous désespèrent,
Qui nous blessent au fond de nous-mêmes,
Ceux où se sont perdus les "je t'aime".

Ce sont des rêves évanouis
Piétinés dans les yeux de l'oubli,
Des déchirures qui ne s'usent plus,

La morsure brûlante à ma porte
Que le temps à chaque instant m'apporte,
Cet anniversaire où tu n'es plus.
 

A califourchon
 

A califourchon, juste en tête à tête,
Tes cheveux dansant leur lente caresse,
Ta bouche m'offre sa délicatesse
Profitant que la lumière s'arrête.

A califourchon, au fond de tes yeux,
Se plonge mon rêve en un bleu profond,
S'ouvre le soleil sous ce bas plafond.
Le diable se cache et montre les cieux.

A califourchon, au creux de tes reins,
Se glissent mes mains, caressent ton dos,
Se jouent vers l'avant, dévoilant le beau,
Allant du nombril au bout de tes seins.

A califourchon, au fil de ta vie,
Tu as enjambé des monts, des vallées
Pour me retrouver un peu à côté
Au cœur des plaisirs, aux joies des envies.

A califourchon, au temps de nos rêves,
Blottis l'un contre l'autre au paradis,
Nous nous envolons sur notre tapis.
Le temps de l'amour n'a aucune trêve.

Pomme ou amour
 

Qu'est la poésie dans ton coeur ?
Le rythme des mots ou les sons,
Des images, une succession
Ou des émotions, la chaleur?

La poésie est liberté,
Celle qui enfante les mots,
Celle qui arrache les maux,
Celle qui nous offre à aimer.

C'est comme une goutte de pluie,
C'est comme un rayon de soleil,
C'est comme un rêve qui s'éveille,
Juste un mot qui, dans ton oeil, luit.

Déposée entre Eve et Adam,
La poésie va ondulant.
Que choisir la pomme ou l'amour ?
Le poète hésite toujours.

[Mais, pour ma part, j'ai choisi.
Dans la pomme, j'ai croqué.
La terre s'est disloquée.
S'est enfui le paradis.]

Le numéro vide
 

Inscrit ici, sans soucis

Il n'apporte plus la vie

Et j'attends les bras ballants

Ce semblant d'instant d'avant

 

Il a créé la magie

Dans nos grands moments d'envie

Entre défis et amours

Instantanés de toujours

 

Et là, maintenant, j'attends

Que reprenne vie la mer

Pour perdre ce goût amer

 

J'espère du ciel l'appel

Redonnant à l'étincelle

Un doux regard souriant

Détails
 

Le retour n'est-il pas le détour
Que chacun effectuera un jour
En ne s'apercevant pas toujours
Que les détails sont des mots d'amour?
 

Des mots
 

Des mots, des mots et des mots manquent...
Ton choix a été de les taire,
Celui de créer mon enfer
Pendant que mon âme s'efflanque.

Assassiner toute parole,
La priver de son existence,
Puis la ruiner de sa substance
Tout en brisant son auréole.

Ton vif souhait de tout éteindre
N'est que la volonté de dépeindre
La mort de toutes émotions.

L'échange est la vraie sensation,
L'existence de la présence.
Le silence est la pire absence.

Feu l'amour
 

Certains croient que le feu s'éteint
Lorsqu'on l'abandonne un matin,
Qu'on peut simplement l'oublier
Sans ne plus jamais s'en méfier.

Certains pensent que la fumée
Dit qu'il a cessé d'exister,
Qu'il suffit de faire le froid
Pour que la braise ne rougeoie.

Mais le feu est d'un autre bois,
Son essence nait de la joie,
Sa croyance est dans la confiance.

Il survit dans la déchéance.
Mais, d'une légère étincelle,
La flamme brille de plus belle.

La honte
 

J'ai connu un homme
Je l'ai rencontré
C'était par hasard
J'ai bien cru l'aimer

Maintenant j'ai honte
Des moments passés
Je n'ai que regrets
Des valeurs brisées

J'ai perdu la tête
J'ai perdu confiance
Alors j'ai enfoui
Ce bout de ma vie
Je l'ai enterré
Tout au fond de moi

L'honneur
 

J'ai connu une femme
Je l'ai rencontrée
C'était par hasard
Je l'ai vraiment aimée

Maintenant c'est l'honneur
Des moments passés
Je crois encore très fort
En l'amour créé

J'ai toujours ma tête
J'ai toujours confiance
Alors j'ai conservé
Ce bout de ma vie
Je l'ai éclairé
Tout au fond de moi

Sous les arbres
 

En fin de matin, sur notre chemin,
Le doute amené, la main dans la main,
Nous sommes sur terre.

Devant l'escalier des arbres, liés
Nos cœurs estropiés plantés à nos pieds,
Contents se libèrent.

Entre les manteaux se glissent les mots
Profitant du blanc qui souffle le beau
Sur tous nos repères.

La montée est douce et parmi la mousse
Qui nous enveloppe est notre secousse,
L'instant qu'on espère.

Le temps s'arrête, débout sur la crête,
Tels deux bouts de bois, implose en fête
Battant l'éphémère.

Puis, si tendrement, sous le sapin blanc,
En un geste lent, j'entre doucement
Dans ton univers.

Sentiments blancs
 

Le blanc s'étend inexorablement
Le blanc s'étend flocon après flocon
Tel un grand rideau
Le temps s'éprend en l'absence de son
Le temps s'éprend du sol au fil des champs
En un blanc manteau

Le froid endort le corps de la nature
Le froid endort encore l'insouciance
Sans aucune ardeur
Le calme nous enveloppe en silence
Le calme nous masque notre futur
Cachant ses laideurs

La montagne se terre sous le vent
La montagne se tait sans percevoir
Le fond de ton gouffre
Les sentiments s'envolent dans le soir
Les sentiments s'endorment dans ce blanc
Pendant que je souffre

Février 2014
© 2014 LJB

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Sur le chemin de  Lucie


Lettres envolées entre 
ciel et terres

 

Quelques mots de poésie
pour raconter une tranche de vie,
rien de plus que quelques instants
perdus dans le fil du temps,

quelques moments en
équilibre instable
sur le fil d'un chemin,
des mots posés ici
après la disparition d'une bulle,
des mots posés ici
pour qu'ils continuent à vivre,
des mots posés ici
pour que ce petit chemin
ne disparaisse pas.

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